Le couple en deuil
Certains couples endeuillés deviennent plus forts après avoir survécu au décès de leur enfant, d’autres n’arrivent pas à surmonter ce terrible drame. Chaque histoire d'amour est différente, personnelle. Mais c'est ensemble et uni qu'un couple peut surpasser la perte de son enfant.
Les erreurs à éviter
Ne pas parler de l'enfant peut porter à croire que le parent l'oublie. C'est important d'évoquer les souvenirs autour de l'enfant disparu, d'honorer sa mémoire. Les parents peuvent repenser à leur bonheur à l'annonce du test de grossesse, aux premières échographies, à la douceur du visage de leur bébé si la rencontre a eu lieue, etc. En outre, prononcer le prénom de son enfant c'est reconnaître son existence et assurer la continuité de son rôle de parent au delà de la mort.
Accuser l'autre. Les reproches sont souvent à l'origine de conflits au sein du couple. En cas de deuil, la colère liée à l'injustice profonde du décès de l'enfant peut se tourner contre son (sa) conjoint(e). L'incompréhesion mutuelle dans le vécu du deuil peut également nourrir bon nombre de reproches. Attention aux mots qui pourraient dépasser la pensée et creuser un peu plus un fossé entre les deux parents.
Culpabiliser. Un fort sentiment de culpabilité peut être ressenti par le parent. La mère dont le ventre a été le premier tombeau de son enfant peut en vouloir à son corps défaillant. Le père peut également culpabiliser de ne pas avoir pu sauver la chair de sa chair. Porter le lourd fardeau de la disparition de son enfant risque considérablement d'accentuer sa propre souffrance et fragiliser encore plus l'estime de soi.
Prendre des décisions seul(e). Le manque de communication, les conflits, ou tout simplement l'urgence de la situation peuvent amener l'un des parents à agir de façon isolée. Les décisions autour de l'enfant disparu sont lourdes à porter, elles sont irréversibles et doivent, dans la limite du possible, être prises par le couple parental.
Remettre son couple en question. Le décès d'un enfant peut fragiliser le couple au point qu'il vole en éclats. Le parent est perdu, le couple se perd, une distance s'installe mais ça ne signifie pas que le point de non retour est atteint. Il faut juste laisser du temps, il reste notre meilleur allié.
Les choses à faire
Acceptez vos différences. La femme et l'homme ont des manières très différentes de vivre le deuil. Chaque partenaire exprime son chagrin selon son vécu, son histoire personnelle, ses envies, ses besoins. Il n'existe pas de chemin type du deuil périnatal. Le non-jugement est une valeur essentielle au bon équilibre du couple.
Exprimez vos émotions. Que ce soit par les larmes, la parole, l'écriture ou encore un suivi thérapeutique, il est nécessaire de pouvoir exprimer son ressenti, de mettre des mots sur les maux. Ecouter ses émotions permet d'avancer dans son deuil.
Apprendre à communiquer. Une écoute profonde et véritable de l'autre est importante. Cela passe par une communication active, écouter attentivement les dits et entendre les non-dits de son partenaire.
Partagez des moments de tendresse. Pouvoir exprimer son affection et apporter réconfort à son ou sa conjoint(e) est indispensable pour surmonter la perte de son enfant ensemble. Ces petits gestes de tendresse permettent de se rapprocher et de rester unis.
Pardonnez-vous et/ou pardonnez à l'autre. C'est se/le libérer de la colère, d'une souffrance trop grandes et se donner la chance de sauver son couple. Le chemin de la résilience passe également par celui du pardon. C'est une étape indispensable à la reconstruction.
Mon couple au bord de la rupture
Après le décès d'Angelina, notre couple a perdu l'équilibre devant ce vide abyssal. La tempête émotionnelle s'est abattue sur nous avec perte et fracas. Comment recoller les morceaux quand son couple vole en éclats ?
Je n'ai pas compris le besoin viscéral de mon conjoint de se raccrocher au travail, de s'enfermer dans un mutisme, de ne jamais parler d'Angelina. Mon monde s'était arrêté, le sien continuait de tourner. J'étais vide, morte à l'intérieur, il était souriant et plein de vie en apparence. Ce sentiment d'incompréhension a fait resurgir des blessures du passé. La distance entre nous s'est très vite installée. La fréquence de nos conflits était proportionnelle aux sentiments de colère et d'impuissance qui nous habitaient. Nous avons évoqué le divorce à plusieurs reprises.
Pourquoi un tel décalage quand une tragédie frappe les deux parents au même moment ? Nous ne vivions pas notre deuil de la même façon. J'avais besoin de parler de la perte de notre enfant, de la pleurer, d'exprimer mes émotions. J'attendais de mon conjoint une écoute, lui cherchait des solutions. C'est un homme d'action, de terrain. Il cherchait à me protéger, préférait éviter de s'épancher pour ne pas ajouter sa peine à mon chagrin. J'ai voulu le forcer à exprimer ses émotions, à dire ce qu'il ressentait au plus profond de son cœur, de son âme. Mais mon conjoint ne dit rien, c'est comme ça. Ça ne veut pas dire qu'il était passé à autre chose, comme je lui ai souvent rétorqué, c'est juste que son deuil était silencieux. Lui me reprochait d'être à fleur de peau, de ne pas arriver à relativiser face aux petits tracas du quotidien. La chute des hormones, le traumatisme de l'IMG m'ont épuisé psychologiquement et physiquement. Je ne supportais plus rien ni personne.
Nous avons fini par nous retrouver. En acceptant nos différences, en respectant le rythme de chacun. Il a fallu apprendre à communiquer, écouter les besoins de chacun. Nous avons repris une vie de couple avec des moments de tendresse. Puis nous avons réussi à nous projeter et enfin trouver un nouvel équilibre.
Aujourd'hui, nous avançons main dans la main plus soudés que jamais.
Angelina, ton passage furtif sur terre nous a ébranlé, puis lentement renforcé, soudé. Nous te devons beaucoup plus que ce que nous aurions pu imaginer. Nous ressentons ton amour et ta protection avec intensité.
Nous espérons que tu es fière de nous, tes parents.
A toi, Angelina, l'étoile la plus brillante dans le ciel.
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